PRUD´HON PIERRE PAUL (1758-1823)
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| Peintre situé à la charnière des deux courants esthétiques de la fin du XVIIIe siècle: le néo-classicisme et le romantisme. Pierre-Paul Prudhon, dixième enfant dun pauvre tailleur de pierre, doit faire preuve de volonté pour saffirmer et être envoyé à lâge de seize ans à Dijon, dans latelier du peintre et sculpteur François Devosge (le maître de Rude). Cest une longue période de formation qui commence, à Dijon dabord, puis à Paris où il séjourne dans latelier du premier peintre, Pierre. Il rentre à Dijon en 1783 pour préparer le concours de Rome organisé par les États de Bourgogne et, devenu lauréat, il part pour lItalie en 1785. En dépit de son isolement de provincial parmi lactif milieu des artistes étrangers à Rome, il fait la connaissance de Canova. À son retour à Paris, cest le début de la Révolution; Prudhon peint des portraits (dont celui de Saint-Just), uvres simples par lexpression naturelle du modèle, le fond uni et le coloris frais. En 1794, le peintre se retire quelques temps dans sa province; il revient en 1796 à Paris pour réaliser les décors de lhôtel de Lanois ainsi que de nombreux dessins de vignettes et des illustrations pour la gravure. Cet art aimable, sensuel et raffiné, empruntant ses sujets à la mode antique, plaît beaucoup à la société enrichie du Directoire. Après un succès au Salon de 1799 pour un plafond allégorique, Prudhon prépare lesquisse dun Triomphe de Bonaparte (musée des Beaux-Arts, Lyon), frise colorée et rythmée. Dans dautres toiles, il abordera le grand genre, la peinture dhistoire; ainsi La Justice et la Vengeance divine poursuivant le Crime (Louvre), qui reflète les deux pôles de son inspiration à la fois sensible et savante. Le célèbre portrait de LImpératrice Joséphine dans le parc de la Malmaison (Louvre) évoque la mélancolie du temps qui passe et rend hommage aux lignes plastiques au moyen dune nature présente, expressive et dun éclairage délicat. À la fois tendre et poignant, ce lyrisme est lessence de ses toile principales, dont les sujets forment autant dallégories de lamour. Il place des figures jeunes dans un environnement vaporeux et lunaire, dans un climat retenu. Plus que linfluence de Corrège ou de Léonard (dont on rapproche le sfumato du modelé prudhonien), cest le «parfum équivoque dalexandrinisme» (Pierre Francastel) qui, dépassant le néo-classicisme, réunit une certaine Antiquité à la mentalité préromantique. Les impératrices ont aimé ses toiles et, lors du mariage de Napoléon avec Marie-Louise, cest à Prudhon que lon demande des dessins pour les décors, le mobilier et les objets exécutés ensuite par léquipe de Thomire et Odiot. Prudhon dessina le berceau du roi de Rome. Sous la Restauration, il revient aux portraits dépouillés.
On a beaucoup souligné le tempérament sensible, très émotif du peintre, son isolement. Prudhon serait, par les malheurs de son existence, lun des premiers artistes romantiques. Après avoir vécu plusieurs années en compagnie dune jeune femme, Constance Meyer, avec laquelle il a travaillé, Prudhon voit lécroulement de cette union: suicide de lamie, solitude des dernières années.
La technique du peintre est très originale. Ses dessins, académies ou scènes à la grâce anacréontique, sont célèbres pour leur élégance et les formes ombrées sur un papier bleu. Les rehauts de craie blanche, lestompe fondant à demi, les nombreuses hachures et les pointillés qui se recouvrent, se complètent, contribuent à créer les formes. On note la même démarche dans les peintures; elles ont été souvent préparées en camaïeu gris ou bleu, que Prudhon relève progressivement de tons délicats, de légers glacis, qui donnent une vibration aux corps, modelés par la lumière.
Vers la fin de sa vie, dans le dramatique Christ en croix (1822, Louvre), la facture est plus large. Malheureusement, beaucoup duvres sont recouvertes dépais voiles opaques dus à un emploi abusif de bitume et à lutilisation dun médium qui s'est mal conservé. Labsence de contours nets, dune situation définie clairement dans lespace, ce goût de lévocation saccordent mal avec la technique de lécole davidienne. Cependant, linspiration et la sensibilité reflètent bien lépoque, un certain courant de lémotion, moins «vertueux», plus humain et plus sensualiste que le didactisme néo-classique.
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